Tuesday, February 15, 2011

Davao City
Une loi demandant aux chauffeurs d’avoir une nouvelle pièce d’identité (ID’s) passe en seconde lecture.

Comme je le faisais remarquer dans un précédent post, conduire aux Philippines relève de la conduite dans la jungle et les accidents impliquant des véhicules de transport public sont de plus en plus nombreux.
Qu’il s’agisse de ‘’jeepneys’’, de taxis, de mini-bus, de baby-bus ou de bus traditionnels, les règles de conduite les plus élémentaires sont rarement appliquées et respectées.


Pour faire face à cette augmentation du nombre des accidents de circulation impliquant des véhicules de transport public, la municipalité de Davao met en place un système de formation permanente des conducteurs.

Le Conseil Municipal (City Council) vient d’approuver, en seconde lecture, une ordonnance obligeant les chauffeurs de véhicules de transport public à obtenir une carte d’identité issue par le Gouvernement local de la ville.
Cette Ordonnance, dont l’auteur est le Councilor (Conseiller Municipal) Pilar Braga, est une réponse faite à la demande du Maire Sara Duterte qui demande à tous les chauffeurs de véhicules de transport public d’obtenir une carte d’identité émise par la mairie, après avoir passé un cours de rafraichissement sur les règles du code de la route.

Ceci fait suite à grave accident de la circulation qui avait fait 10 morts en septembre dernier.


Même si la municipalité a déjà commencé à conduire des séminaires et à délivrer les cartes aux premiers chauffeurs, une ordonnance municipale est nécessaire pour en faire une loi.

Si approuvée en troisième et dernière lecture, l’ordonnance obligera tous les conducteurs d’assister au séminaire proposé par la municipalité, sur la conduite, la sécurité, la courtoisie sur la route, la discipline, le code de la route et les différentes ordonnances qui régissent le trafic routier dans la ville de Davao. L’assistance au séminaire sera obligatoire pour l’obtention ou le renouvellement du permis de conduire.
Aucun chauffeur ne sera autorisé à conduire dans Davao City sans cette pièce d’identité.

L’absence de carte d’identification sera considérée comme une violation du code de la route et punie par une amende. 
Braga ajoute que les docteurs, les avocats, les infirmières, les professeurs, etc. suivent une formation permanente et les chauffeurs doivent en faire autant, car ils ont les vies de personnes entre leurs mains.


La ville de Davao, dirigée par la famille Duterte, est souvent montrée comme une pionnière. Cette nouvelle réglementation ne fa 
fait que renforcer le rôle de précurseur qu’entend mener la ville au niveau national.



LA MORT D'UN GENERAL

Ce qui fait la une des journaux télévisée et de la presse locale en ce début de semaine, c’est le suicide de l’ancien Commandant en Chef de l’Armée Philippines, le Général Angelo Reyes.

Angelo Tomas Reyes, 1945-2011.
Angelo Reyes est né dans le quartier de San Miguel à Manille le 17 mars 1945, fils de Pablo et Purification Reyes, tous deux professeurs. Reyes considérait Binangonan, dans la province de Rizal, comme la ville de ses ancêtres
Reyes est diplômé de la Ramon Magsaysay High School de Cubao, qui se nommait alors Cubao High School. Il entra à l’académie militaire des Philippines et sorti Nº 7 de la classe PMA 1966.

Reyes a occupé les fonctions suivantes au sein de l’armée philippines puis de l’état Major des Forces Armées Philippines.
         - Commandant des Special Forces groupe PA ( Airborn, parachutistes) ;
         - Officier commandant (CO), du 4ème Bataillon d’Infanterie PA, Zamboanga ;
         - CO, de la 602ème Brigade d’infanterie PA, dans les provinces de Davao ;
         - Commandant en Chef, du service des relations avec les Civils AFP ;
         - Deputy, Chief of Staff pour les renseignements, J2 AFP ;
         - Commandant Général de la 5th Division d’infanterie, Nord-Est Luzon ;
         - Commandant Général Southern Command AFP, qui couvre Mindanao ;
         - Commandant en Chef de l’Armée Philippine ;
         - Commandant en Chef des Armées.


Reyes a joué un rôle pivot dans la destitution du Président Estrada et son remplacement par Gloria Macapagal Arroyo en janvier 2001.

Alors, Général en chef de l’Armée, meneur de la hiérarchie militaire, il a fait en sorte que l’armée retire son support au Président élu (ce qui est contraire à la constitution) pour le reporter sur un mouvement de contestation, que l’on nomme (un peu pompeusement) Edza II, en référence à la révolte (une véritable révolutions du peuple) qui avait amené la chute de Marcos en 1986.
De ce fait, sans le soutien de l’armée, le Président Estrada avait été obligé de quitter le Palais de Malacañan, laissant la porte ouverte à l’arrivée de Gloria Macapagal Arroyo à la tête de l’Etat.


De ce fait, en récompense de ses bons et loyaux services, il occupera les fonctions clés suivantes au sein de l’administration Arroyo, après avoir été mis à la retraite de l’Armée :
-          Secretary, Department of National Defense (DND, ministre de la Défense) du 19 mars 2001 au 29 août 2003 ;
-          Secretary, Department of Interior and Local Gouvernment (ministre de l’Intérieur)  du 12 juillet 2004 au 14 février 2006;
-         Secretary, Department of environment and Natural Ressources, ministre de l’environnement et des ressources naturelles (beaucoup d’argent à se faire), du 15 février 2006 au 31 juillet 2007;
-         Secretary, Department of Energy, ministre de l’énergie (DOE), du 1er août 2007 à mars 2010.


En plus de ses fonctions officielles au sein du Gouvernement, Reyes détenait également un nombre substantiels de postes civils en relation avec l’application des lois, l’environnement et l’énergie et était également Président ou vice-Président de nombreuses entreprises publiques.

Durant sa longue carrière militaire puis plus tard de sa carrière civile, Reyes a été diplômé de plusieurs hautes écoles et universités comme l’Asian Institute of Management et de la Harvard University’s Kennedy school dans le Massashusetts.
Reyes donna sa démission du poste de ministre de l’énergie pour se présenter comme Congressman lors des élections de mai 2010. Du fait de questions posées par des organisations militantes sur son rôle supposé dans plusieurs scandales, son parti, le 1-UTAK décida de retirer sa candidature.
Il laisse une veuve et cinq fils.



Pourquoi Reyes s’est-il suicidé ?
Depuis plusieurs semaines, un sujet brulant refait surface … le détournement par la hiérarchie militaire d’une partie du budget de l’armée ainsi que la disparition pure et simple de fonds en provenance de donations (par les Américains principalement), ainsi que de paiements par l’ONU de missions de paix effectuées par les troupes Philippines à l’étranger.
Cela représenterai plusieurs centaines millions de US$ !

Reyes, accusé par des subalternes, était entendu par le Sénat dans le cadre d’une ‘’prime’’ de 150 millions de pesos (US$ 3,6 millions, € 2,5 millions) qu’il aurait touché lors de son départ à la retraite en 2001. Interrogé par le Sénat sur un versement de 50 millions de pesos, sa seule défense aurait été de dire qu’il ne se souvenait pas d’avoir reçu cette somme.

Cette affaire de détournements de fonds du budget de l’armée est récurrente depuis plusieurs années. Cela avait été le motif du soulèvement d’une fraction de l’armée en 2003, la mutinerie de Oakwood, puis se quelques autres tentatives de mutineries au cours de la période Arroyo.

Il semblerait que les langues se délient, va-t-il en sortir quelque chose ?


Un autre témoignage vient confirmer que quelque chose était pourri au sein de l’armée philippine.

Les militaires ont dépensé la moitié des fonds destinés à la modernisation de l’armée en achats de fournitures de bureaux, achats effectués auprès d’une poignée de fournisseurs et sans appels d’offres. Déclaration de Heidi Mendoza, auditeur des comptes de l’armée, lors de la procédure d’enquête au Congrès.
Mendoza affirme que les Forces Armées Philippines (AFP) ont dépensé plus de 76 millions de pesos, soit près de la moitié du 1,6 milliard du fond de modernisation pour l’année 2003, en achats contestables de fournitures de bureau, comme classeurs, ancres, disquettes et cartouches pour imprimantes.


L’ancienne auditrice d’Etat dit également que les achats ont été effectués auprès d’une poignée de fournisseurs et ce à des prix différents. Elle ajoute que l’AFP a même fait l’achat de cartouche de printers qui ne peuvent être utilisées par les imprimantes de l’armée !
Cela pourrait relancer un autre aspect de cette affaire, le deal pas très net passé entre le Ombusman et le Général Garcia.

Je reviendrai sur tout ceci ainsi que sur les éventuels développements dans un prochain post.

Lors de sa prise de fonction (usurpation ?) au sommet de l’Etat philippin, Gloria Macapagal Arroyo n’a que peu d’appuis dans le pays. Ce sont des personnes comme Villar, Singson, etc. qui ont certainement financé, pour la destitution (empêchement) de Estrada et la mise sur le trône de Gloria Arroyo. Au tout début de son règne, lors de son installation au Palais de Malacañan, une révolte populaire (bien orchestrée) a bien failli l’emporter. Sans le soutien de l’armée, alors commandée par A. Reyes, ses chances auraient été bien minces.


Ce sera le système de Gloria Arroyo tout au long de son long règne : faire en sorte que les hauts gradés de l’armée (et de la police) reçoivent argent et de bonnes places (planques) au sein du Gouvernement, des agences gouvernementales ou des sociétés d’Etat, une fois mis à la retraite. Les changements à la tête de l’armée (AFP) et de la Police Nationale (PNP) vont se faire à un rythme infernal. La valse des généraux sur une musique composée par Gloria M. Arroyo. Un général part à la retraite, il donne ses consignes à son successeur. Si tu veux toucher ton ‘’Pabaon’’ (prononcer baon, provision de monnaie, nourriture ou équipement, généralement  pour un voyage, pot de vin) dans six mois lors de ton départ en retraite … tu suis mes recommandations et apporte le soutien de l’armée à notre Présidente. Ainsi fonctionnait le système Arroyo, au détriment de la modernisation et de l’efficacité des deux corps, armée et police.
C’est ce qui peut expliquer, en partie tout du  moins, que la poignée d’Abu Sayyaf coure toujours, que des armées privées font régner la terreur dans certaines provinces, que les membres du NPA (New People Army, le bras armé du Parti Communiste Philippin) soient toujours actifs, etc.

Car, si nous regardons l’histoire récente des Philippines : Marcos, ancien général en chef de l’AFP, n’a pu se maintenir au pouvoir aussi longtemps que grâce au soutien de l’armée (et des Américains).
Le jour où l’armée (alors commandée par Fidel V. Ramos) lui a retiré son appui (certainement avec l’aval et la monnaie des Etats-Unis), Marcos est tombé. Sortant d’une Dictature militaire, difficile de mettre un général à la tête du pays … Ramos attendra donc sagement six ans avant de se faire élire (1992-1998). Il apportera tout le soutien nécessaire à Cory Aquino (qui réellement dirige le pays durant cette période ?).

Les six ans de présidence de F.V. Ramos, l’ascendance de l’acteur J. E. Estrada, sa chute brutale, fausses accusations (Singson, entres autres), lâché par Reyes, donc par l’armée … destitution, sacre de G.M. Arroyo qui va faire en sorte que l’armée (les hauts gradés tout du moins) lui soit totalement fidèle. Ce qui ne sera pas tout à fait le cas, quelques mouvements de renversement ou de déstabilisation seront menés à plusieurs reprises par de jeunes officiers. Il semble que depuis des décennies, l’accession et le maintient au pouvoir de civils, ne peuvent se faire sans l’aval et l’appui de l’armée, qui reste aux Philippines la clé du pouvoir.
Néanmoins, Angelo Reyes recevra les honneurs militaires et les sacrements de l’église lors de ses funérailles. Etrange pays.




Expériences, critiques et commentaires, comme d’habitude sont les bienvenus. 

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